« I know the voices dying with a dying fall
Beneath the music from a farther room »

T.S. Eliot, « The Love Song of J. Alfred Prufrock »

On a fait une cérémonie pour l’arbre mort, dont la chair sèche et béante avait été offerte au soleil.

On a sonné des cloches et des gongs sous ce dôme immense, et on a cru voir trembler le ciel comme un capot d’extase.

Une voix effacée parlait dans mon crâne, et ne cessait pas, et encore, et les choses à faire, et la nourriture, et mon corps et mes yeux ;
et puis quelques inconnus qui se mettaient à courir sur mes vastes étendues, et leurs membres sombres inondaient mon image, et leur sonorité comme seule trace de leur présence, et la barque du soleil en plein voyage au-dessus de leur voyage,
et des tâches de pollen au milieu, et des bêtes caquetantes sur le bord de la rive, 
et ce courant d’air et puis non, un peu de sérieux…

Tout durait, et le corps ouvert et les membres et le temps tout ça avançait indifféremment, et leurs hurlements s’évaporaient, et de la carcasse fumante exhalait une odeur de sang et de fleurs. 
Tout durait, comme sur une plaine morte on voit apparaître des fantômes de chevaux et d’armures, tout allait exister à jamais, et se jeter sur des yeux opaques, et tout persistait et tout persisterait sous la contrainte du soleil, sur la contrainte d’une terre de chiens, sur le fil qui se tend entre tous nos poumons à nous tous, tout continuait à ne jamais finir, tout serait cette pierre brute, inaltérable, inaltérable celle qui n’a pas encore éprouvé le vent.

Tout tiendrait, stable.

Et puis cet acide qui montait et descendait, de mon ventre à mon cou, sans cesse

[…]