Il ouvre le livre d’Esther. 

Dans la cour de Xerxès elle émerge,

dans l’embrasure d’une fenêtre, sur la coiffe d’un roi Achéménide,

dans la richesse des panoplies, des jupes et des boucles de ceinture ; 

elle danse.  

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On dit qu’elle s’appellerait Hadassa, moi je dirai Esther ; puissance divine, être, quel que soit ton nom — elle est une grande robe rouge et blanche, elle brille et tinte. 

Esther n’a rien pour la contraindre. Rien ne l’empêche. Elle danse, et c’est comme si elle était la fumée qui suit le haut de la flamme d’une bougie. Et après elle perd la forme qu’on croyait être sienne, elle devient autre chose. Chaque seconde la fait changer. On ne peut la dire qu’en caricaturant son absence, en avançant qu’il est impossible de faire d’elle un dessin, ou même un croquis, en prétextant que ce ne serait qu’en la voyant qu’on pourrait comprendre.

Et elle est en perpétuel déséquilibre, les intimidations, les lois, les dagues la menacent, et face à ces conspirations elle est nue, nue et couverte de cendres, sa gorge s’assèche, elle jeûne et elle pleure en silence.

Puis, après avoir subi, elle s’élève, elle est en colère, elle prend la parole : Elle pointe du doigt, Elle parle avec force, l’ennemi tremble avec terreur, il implore la pitié, et pendant qu’on cligne des yeux, d’un claquement de doigts il a disparu. 

C’est tellement étrange, je ne me suis jamais autant senti libre qu’à travers elle.

Et au fond, même si elle était criminelle, méchante, manipulatrice, dépravée, Esther serait gracieuse, comme Apollon est gracieux quand il châtie Midas. Elle serait gracieuse parce qu’elle nous permet, elle nous permet de la voir, et de l’entourer, dans une sorte de grande ronde, où nous sommes tous égaux, tous à égale distance d’elle, tous prêts au sacrifice.

On la voit à travers l’embrasure de la fenêtre, elle s’est assise de travers sur son trône de reine. Elle regarde une pièce vide, 

Il referme le livre.