Toi chair regarde-toi
Toute éclairée de rouge et de bleu
Toi les barques d’exil amarrées aux bois de sel
Les barques toutes soufflées des vents-machettes
Toutes pleines de mer morte
Toi peaux fragiles toi qui grommelles toi dont le diaphragme croule sous le son
Tu me regardes de ton œil froid
Tu me regardes de l’œil endormi de l’œil des nuits sans souffle
Tu me regardes de ta bouche repliée en avant comme les laitues, sèche comme le désert
Toi chair heurtée qui donne au vide des chants de gloire, qui trébuche sur un sol de sucre et de sang
Et tes tissus et tes bijoux comme les tapis anciens, ta peau en incendie comme la tente le jour de tonnerre
Et ta peau en incendie comme le jour de ta deuxième naissance
Porte-sur-la-falaise, fermée fermée,
Écoute la voix sans nom et sans forme, au-dessus de ton crâne et de notre voûte,
Écoute ce chœur dans tes cheveux,
Écoute ma voix racler le fond de ta gorge,
Je suis le dégoût au milieu de toi ;
Regarde frère sœur, je vois nos crevasses sur tes lèvres
Et jamais la lumière ne scintille comme ici
Et jamais on n’a vu pareille tristesse qu’en ta joie
Et je n’avais pas vu des voix si basses creuser dans des crânes si beaux
Regarde-nous Scintillement, nous courbes et trajectoires
Notre trace remplie de son jusqu’aux poumons, notre vibration acharnée
Regarde notre corps qui embaume déjà les herbes des morts, et les bandelettes encore si claires sur leurs corps aboutis
Et le beau tissu, plus beau que nous, beau comme princes inventés, plus beau que
Ce corps qui fut nôtre avant les hyènes