Traduction de « Urination » d’Andrew Mcmillan extrait du recueil Physical.

J’ai peur de raccrocher quelqu’un pendant qu’il pisse

les lundis je suis un cheval de bât         les sacs qui pendent

hochant près des corps des urinoirs

et un jour          je sais       que j’heurterai quelqu’un

et qu’il pissera le long de sa jambe       ou qu’il se tournera légèrement

et montrera à un autre homme son jet abondant

ou qu’il tombera dans sa propre flaque fraîche

la bite molle      et aucun de nous ne regardera

ou il me regardera évitant de le regarder

faisant semblant d’être intéressé par les carreaux beiges

peut-être parce que je rêve d’être raccroché

détourné de mon but par un inconnu

le contact le plus court pendant cet acte privé

les toilettes sont une intimité

seulement partagée avec les parents quand on est jeune

et une nouvelle fois quand ils sont plus vieux

et avec des amants quand         par exemple      un dimanche

matin s’étirant dans la salle de bain

on s’éveille au bruit de l’écoulement dans la cuvette

et on marche pour étreindre le corps nu

debout son dos offert         et on embrasse sa nuque

et on goûte à cet endroit le recel de la nuit passée

et on respire l’odeur de cette perte jaune pâle du matin

et on prend son membre dans la main

et on ressent ce liquide le traverser

et en sachant que ça c’est l’amour         la chair exposée

ce que nous expulsons du corps et ce que nous laissons à l’intérieur